Il y a des films tellement “cultes” qu’on a l’impression de les avoir vus tellement on en a entendu parler. Ils font partie du paysage culturel et tapissent la toile de fond de notre mémoire collective. Et pourtant certains films, il ne faut pas se contenter d’en avoir entendu parler, il faut les voir: “L’Exorciste” (adapté de l'ouvrage du même nom de 1971 écrit par William Peter Blatty) est l’un de ceux-là. Je m’attendais à flipper, à dormir avec la lumière allumée, à être poursuivie par des images ou sentiments dérangeants pendant des jours (et des nuits), mais en fait la terreur ne domine pourtant pas les impressions laissées par ce film.Au début, on se retrouve étonnamment transporté en Irak avec l’appel du muezzin en fond sonore, sur un lieu de fouilles archéologiques. Une atmosphère à la " Indiana Jones" en plus sobre et authentique, sans musique inquiétante, une rencontre entre un prêtre âgé et passionné d’archéologie, trouvant une statuette d’un démon antique et l’éphigie du démon Pazuzu au soleil couchant dans le désert. Vision, méditation ou réalité, nous n’en savons pas plus. Une façon de nous rappeler que l’origine des entités diaboliques remonte à des temps très reculés, précédant probablement l’homme civilisé et je n’ai pu m’empêcher de penser à “Enki” ancien Dieu sumérien, cité dans le Nécronomicon. Je me suis sentie alors immédiatement conquise par le film qui s’annonce bien plus riche qu’un film d’horreur de base. Le rythme est calme et passionnant, le réalisateur prend le temps de poser sa thèse, d’introduire les personnages (la fille, la mère, l’ami de la mère,un prêtre psy et sa vielle mère, un flic) , le contexte et le sujet maléfique, comme quelqu’un qui sait bien raconter une histoire et nous tenir en haleine.
Nous somme progressivement introduits à la jeune adolescente Regan et sa mère Chris actrice célèbre, et sommes témoins de leur complicité et de la personnalité adorable de l’enfant. Puis les premiers signes surnaturels (bruits dans le grenier, lit qui tremble, comportements décalés de la jeune fille) apparaissent jusqu’à devenir évidents et terrifiants (j’ai baissé le son pendant les cris), et que “quelque chose” de démoniaque pénètre l’atmosphère profondément sans que l’on puisse le saisir tandis que Regan semble avoir disparu pour laisser la place à un monstre abjecte et violent. Cependant l’investigation du mystère prédomine et fascine à travers les prêtres et le principe d’exorcisme, que l’on découvre dans un style presque documentaire. Evidemment, tout est bien qui finit bien et l’on a même pas le pressentiment que le diable rôde encore, il semble s’être totalement volatilisé devant la toute puissante sainteté des hommes d’église. En fait de film satanique, on se laisse presque convaincre de la bonté catholique et de son efficacité contre le mal démoniaque, en se demandant si le Vatican n’ aurait pas reçu des royalties.
“- Pourquoi, une jeune fille?
- Peut-être pour essayer de montrer le côté animal et monstrueux de l’être humain, détruire l’ espoir qu’il puisse être aimé de Dieu”…