La pleine lune de la semaine d’Halloween m’a emmenée dans un lieu intrigant et baroque, celui de « Crimson Peak ». Une histoire de spectres et de passion destructive où l’on se perd dans la mélancolie de regards bleus dans les couloirs obscurs d’un manoir grandiose hantés de créatures tourmentées. C’est comme une peinture vivante dans laquelle on pénètre tout au long du film, un plaisir visuel intense soutenu par une ambiance sonore enveloppante.
L’histoire n’est pas essentielle, ni passionnante, c’est la trame qui soutient le jeu des acteurs orchestré sans fausses notes, un prétexte pour faire des images dans une atmosphère choisie. Tom Hiddleston est le parfait brun ténébreux dont l’âme torturée transparait dans le regard, Jessica Chastain, son alter ego féminin tout aussi idéale. Mia Wasikowska en ingénue dominée par ses émotions est le personnage éthéré typique, à la sensibilité extrasensorielle lui permettant de communiquer avec les esprits. L’ensemble créé un délice gothique plus proche de la tragédie que de l’horreur, dont on ressort comme touché par une grâce sombre.
La tendresse de Guillermo del Toro pour les monstres s’exprime dans la jubilation avec laquelle les créatures d’outre-tombe ont visiblement été créées. Elles ne correspondent en rien aux clichés vaporeux auxquels on pourrait s’attendre quand il s’agit de fantômes. Elles sont ambiguës, éveillant la terreur et la compassion à la fois, et on ne se lasse pas de les découvrir dans toute leur splendeur macabre. Les monstres sont aussi dans les sentiments, un amour sordide et intense, dont la fascination ne cesse qu’avec la mort, et encore…